Bourses, fin du XVIIIème, premier quart du XIXème siècle

La broderie en Russie

La broderie est un des fleurons de la culture artistique russe. Pour sa création, on utilise uniquement un mince fil souple en lin, coton, soie ou métal. Cet art décoratif remplit une seule fonction : il sert à orner un vêtement ou à décorer un intérieur.

Le talent artistique du peuple russe s'est manifesté brillamment à travers l'art de la broderie. La broderie existait déjà avant l'invasion mongole de la Russie. Lors des fouilles des tertres funéraires et des sites habités, les archéologues ont découvert des fragments de tissus avec des traces de broderie qui permettent de parler de la haute maîtrise de cet art en ces temps très reculés. Les premiers témoignages écrits évoquant les broderies russes remontent au XIème siècle.

Au cours des siècles, la broderie fit partie intégrante des ornements vestimentaires et du décor d'intérieur. Brodées artistiquement, la toile la plus commune et la riche soie "vénitienne" prenaient l'une comme l'autre une valeur inestimable. Dans les motifs de la broderie, se reflétaient l'image poétique que le peuple se fait du monde et de sa foi profonde.

Une des particularités russes est la broderie "à sujet" ou "sur une face", beaucoup utilisée entre les XII et XVIIème siècles. En ce qui concerne sa destination et son contenu, la broderie "sur une face" est étroitement liée à l'ancienne peinture russe. Elle se développa en unité de style avec la peinture d'icônes de la même époque. Les ouvrages de broderie "à sujet", avec des images de saints ou des compositions à thèmes religieux - voiles, draps mortuaires et autres - de pair avec les icônes et les fresques, embellissaient les murs des cathédrales et étaient utilisés comme objets sacrés. Ils étaient conservés avec un soin tout à fait exceptionnel en tant que valeurs matérielles.

La broderie était exécutée en soie, en or, en argent, en pierres précieuses et en perles. Les tissus en soie importés de l'Occident ou de l'Orient, comme par exemple le taffetas, la soie à dessins et le satin, servaient de fond habituel pour la broderie.

Le visage et les parties d�couvertes du corps étaient brodées en fil de soie de couleur claire. Les vêtements et les autres détails de la composition étaient réalisés en soie de diverses couleurs et en fil d'or ou d'argent tréfilés ou filés (l'or étant souvent remplacé par l'argent doré).

On brodait en soie "de part en part" du tissu (broderie double face) ou en fils métalliques appliqués sur le tissu en rangées parallèles très serrées et fixés en des endroits déterminés (technique de fixation ou "à l'attache") à l'aide d'un mince fil de couleur or ou argent, ou de couleur contrastante, en fonction du thème artistique. Les brodeuses disposaient d'une grande réserve de "dessins à fixer" variés - allant de simples figures géométriques aux plus compliquées qui imitaient diverses factures désignées par des noms poétiques, comme par exemple "petit grain", "petit sou", "petite plume", "petite punaise" et autres.

A travers la broderie "sur une face" de l'ancienne Russie se manifeste le travail collectif des ouvrières de talent. Les dessins à composition complexe étaient "marqués" habituellement par un "artiste en chef". Celui-ci appliquait les contours de l'image sur le tissu et désignait sur papier les échantillons de couleurs. Sous les fils rongés par le temps, on peut encore observer parfois, sur les anciens ouvrages, les contours marqués du dessin originel de la broderie. Le scribe écrivait sur le tissu le texte qui accompagnait la composition fondamentale et le "spécialiste des fleurs" dessinait les motifs ornementaux. Du talent des brodeuses, de leur habilité et de leur expérience, dépendaient les qualités artistiques de l'ouvrage. Elles choisissaient le matériel et le système d'application de la broderie, elles réalisaient la solution artistique de l'objet dans son ensemble et ses couleurs. Le talent des brodeuses définissait le degré d'expressivité des images saintes et l'impact émotionnel de l'ouvrage. La broderie sur une face était exécutée dans les mansardes des demeures des gens riches et dans les monastères.

Dans la broderie à sujet des XV et XVIème siècles, la richesse et l'abondance des couleurs est spécifique. On utilise largement la soie colorée, tandis que les fils d'or et d'argent se retrouvent, par excellence, dans les détails. Les coloris de la broderie sont proches de ceux des icônes de cette période, l'effet d'ensemble étant dû à des mariages de tons contrastants et à l'utilisation locale de la couleur.

Au XVIIème siècle prend fin une certaine étape de développement de la broderie "à sujet", en rapport avec l'évolution générale de l'art ancien russe. Au cours des époques qui suivirent, la broderie "à sujet" a perdu de ses hautes qualités artistiques. Dans les objets du culte religieux, elle est remplacée par la peinture, dans les détails isolés. Les traditions et les procédés techniques de la broderie ancienne russe à sujet ont été utilisés pour les objets usuels par les générations postérieures des brodeuses russes.

Cette broderie, à de rares exceptions près, est exécutée en fils d'or et d'argent et en soie importée d'Orient. Bon nombre de pièces sont agrémentées de grandes perles, de pierres fines et de lamelles en métal à dessin. Cette broderie luxueuse était destinée aux notables féodaux. La broderie populaire de ces temps n'a pas été conservée, mais ses traits caractéristiques se sont reflétés dans les objets qui étaient créés pour l'entourage des prince et le riche clergé.

Les sources de la broderie ornementale russe apparaissent dans la collection des pièces archéologiques dans laquelle sont présentés des fragments de broderie de la période prémongole et des époques postérieures. En grande majorité, c'est une broderie sur tissu en soie exécutée à l'aide d'un fil d'or, sur deux faces, ou à l'attache, à dessins ornementaux. Une série de fragments représentent une broderie exécutée en fils de soie.

Les compositions ornementales de la broderie en fil d'or comprennent des dessins floraux et zoomorphes. Les représentations des oiseaux, des bêtes, des animaux fabuleux dans les broderies d'or des XVI et XVIIème siècles sont profondément traditionnelles et se rencontrent dans l'imagerie de l'art populaire russe des différentes époques. Bon nombre de dessins ont été inspirés par la somptueuse ornementation des tissus en soie et en velours rapportés en profusion, pendant les XVI et XVIIème siècles, des pays orientaux et d'Europe occidentale.

Les ouvrières russes ont trouvé, dans les dessins des tissus étrangers, des motifs dé�coratifs répondant à leur conception du beau et les ont introduits hardiment parmi les images habituelles. Les motifs décoratifs traditionnels et étrangers, s'entrela�ant dans une infinité de variantes, se transformèrent en dessins et compositions inattendus.

Dans la broderie d'or du XVIIème siècle se répand largement l'ornement floral. Les brodeuses habiles ont apporté une importante contribution au développement de l'ornement floral russe en l'enrichissant par des formes nouvelles. Les ouvrières russes puisaient également leur inspiration dans la vie de tous les jours, par exemple dans la représentation des scènes de la chasse au faucon, si populaire en Russie.

La broderie d'or russe est caractérisée par la perfection de sa composition : toutes les représentations s'équilibrent réciproquement dans le plan et restent bien proportionnées, leurs contours sont soumis à un certain rythme intérieur et même l'espace non recouvert par la broderie garde le caractère d'un dessin ornemental. La composition reflétée dans un miroir avec une construction symétrique du dessin par rapport à un axe central vertical est caractéristique de la broderie d'or de la fin du XVIème et du début du XVIIème siècle. Le "peintre en chef" de ces temps ne se pose pas de problèmes de peinture, mais en revanche il est passionné par la recherche du rythme et la distribution des messes dans le plan. La particularité des couleurs de cette broderie constitue un mélange contrastant de l'or et de l'argent sur un fond foncé (de préférence noir ou rouge), ce qui donne à la broderie un aspect solennel. Dans la broderie, seuls les détails du dessin sont marqués par la polychromie.

Pour la broderie ornementale de la deuxième moitié du XVIIème siècle, les dessins somptueux sont caractéristiques. De cette époque date une composition comportant, au centre, un motif fondamental doté symétriquement, des deux côtés, d'éléments complémentaires. Le plus souvent, il s'agit d'une grande fleur stylisée, richement élaborée, de laquelle partent des rameaux sinueux garnis de feuilles ou de fruits. De telles compositions rappellent, par leurs proportions et leur caractère, l'ornement des vignettes des incunables de l'ancien Moscou.

A partir du XVIIème siècle, on peut observer, dans la broderie d'or, l'apparition toujours plus fréquente d'éléments baroques. La broderie à haut-relief "sur carte", dans laquelle les détails de volume sont exécutés séparément et ensuite appliqués sur le fond, se répand de plus en plus. On les unissait par des "tresses" à des dessins. Ce genre de broderie ressemblait aux ouvrages sur métal. Les contemporains l'appelaient "broderie bosselée".

De pair avec d'autres particularités de la broderie de ces temps se propage le procédé original de "broderie à contours" dans laquelle le fond de l'ornement est brodé en fils métalliques, et où le tissu "filtre" sous la forme d'un dessin fin à contours.

A la fin du XVIIème siècle, parallèlement à la broderie dans laquelle dominent l'or et l'argent, apparaissent des oeuvres à ramages brodées en fil de soie écarlate, framboise, bleu et vert et où le fil d'or ressort comme un complément des détails.

La broderie des riches scapulaires d'église abonde en matériaux précieux : perles, pierreries, paillettes d'or. Ils ne s'utilisent pas enchâssés isolément pour amplifier l'expression artistique des ouvrages, mais comme des matériaux de base qui créent eux-mêmes le dessin. La broderie en perles, dans des ouvrages plus anciens, s'utilisait principalement avec des lamelles dorées et une dispersion de pierres fines aux couleurs variées, paillettes et lamelles d'or.

Les châles représentent un patrimoine de grande valeur dans la collection de broderies décoratives anciennes. On en faisait large usage dans la vie quotidienne : ils étaient liés aux cérémonies de mariage, servaient de complément décoratif aux vêtements, étaient offerts à titre de présents aux ambassadeurs. Ils étaient richement décorés de broderies en soie, de fils d'or et d'argent, de perles et de dentelles. Les ramages, les volutes, les fleurs, les oiseaux et les vautours à deux têtes, les cerfs et les licornes et des tresses variées entraient dans l'ornement de leur bordure. Le schéma fondamental du dessin de la bordure sur les petites foulards décoratifs du XVIIème siècle était constitué d'une ligne ondulée avec des tiges qui partaient symétriquement des deux côtés. L'ouvrière appliquait le procédé "double face", recherchant la même pureté dans la reproduction du dessin, tant sur l'endroit que sur l'envers. Pour qu'ils soient plus somptueux, on décorait les bords des foulards avec de longues franges en soie et fil d'or. Par comparaison avec la broderie d'or sur soie, ces foulards en tissu clair plus léger se caractérisent par leur élégance.

La broderie ornementale artistique exécutée en fils d'or et autres matériaux précieux, destinée à l'usage profane et ecclésiastique, était similaire dans ses dessins et sa structure. Y figuraient en prépondérance des motifs profanes. A côté d'autres oeuvres d'art, elle entrait dans l'ensemble général qui créait une atmosphère opulente et somptueuse à la cour impériale russe et magnifiait le rôle de l'Eglise.

Les motifs et les principes de construction du dessin de la broderie ornementale russe des XVI et XVIIème siècles, étroitement liés à d'autres variétés de l'art décoratif appliqué russe, ont poursuivi leur développement ultérieur dans la broderie paysanne des XVIII et XIXème siècles. On peut le constater dans la broderie d'or des toques féminines de fêtes et dans la broderie paysanne du XIXème siècles de plusieurs régions du nord de la Russie.

Les dessins de la broderie du XVIIIème siècle étaient d'origine florale avec des motifs stylisés. La forme de l'oeillet, de la tulipe et de l'églantine fut mise au point dans l'ancien art russe des XVI et XVIIème siècles. Au XVIIème, le bouquet de fleurs aux tiges serrées d'un noeud de ruban et le vase de fleurs occupent une place importante dans la composition florale. Ces sujets sont entrés dans la broderie populaire probablement sous l'influence des dessins de tissus en soie fabriqués industriellement en Russie et qui servaient habituellement à la confection des sarafans de fête (robes à bretelles, ancien vêtement des femmes russes). Le vase de fleurs était également très répandu dans d'autres formes de l'art populaire.

La broderie du XVIIIème siècle échappait aux innovations de Pierre le Grand et se développait dans le cadre de l'art paysan de tradition russe. La broderie des classes dominantes - des propriétaires fonciers, des bourgeois et même de la cour impériale - reflétait les mouvements de la mode européenne et était subordonnée aux changements des styles artistiques. Cette broderie est représentée par des pièces de vêtements masculines et féminins, par des objets de décoration et autres oeuvres à caractère la�que et ecclésiastique. Beaucoup sont dues à des ouvrières de servage. Dans les vêtements masculins, la disposition d'une broderie autour de toutes les fentes rappelle les anciennes croyances, quand les diverses représentations sur les habits remplissaient non seulement une fonction décorative, mais constituaient aussi une protection contre les mauvais esprits.

La broderie au fil d'or poursuivit son développement dans l'art populaire pendant le XIXème et le début du XXème siècle dans les coiffes, les châles de fête et les garnitures du vêtement paysan. A chaque époque, elle a acquis des particularités stylistiques, tout en conservant sa base traditionnelle.

La broderie à perles, très répandue dans les régions nordiques et centrales de la Russie, était liée à l'existence des matériaux fluviaux locaux (perles d'anodontes). Les toques de valeur étaient parfois ornées de grandes perles importées d'Orient. Les vêtements parés de broderie à perles n'étaient accessibles qu'aux paysans et aux citadins riches. Ils étaient très estimés, jalousement conservés et portés uniquement pour les grandes fêtes ; ils entraient dans la composition des dots et se transmettaient par héritage. Dans la mentalité populaire, les perles, l'argent et l'or représentaient une sorte de critère de beauté et d'opulence. Les chansons et les ballades épiques parlent de "pur argent", "or précieux", "perles de belle eau".

Les dessins brodés dès la moitié du XVIIIème siècle sont dominés par la rocaille, le carreau, la corbeille de fleurs. Cette broderie avoisine souvent avec une dentelle en fil léger. L'accord harmonieux entre les deux techniques ne faisait qu'imprimer une élégance toute particulière à ces objets.

Au XVIIIème siècle, chez les propritaires terriens et les bourgeois, se multiplient les thèmes de paysages et de scènes de vie brodés au plumetis ou au point de croix sur canevas. Ce type de broderie était un ouvrage de dames très à la mode. Des patrons que l'on achetait dans le commerce servaient de modèles de dessin.

A la fin du XVIIIème siècle, la robe au corsage lacé et la jupe d'une ampleur démesurée firent place à la robe Empire taillée dans un tissu vaporeux semi-transparent, imitant les tuniques antiques. Ce type de robe a dominé pendant les deux premières décennies du XIXème siècle. La robe Empire en tissu blanc ou de teinte unie présentait de prodigieuses possibilités d'ornementation où la broderie occupait une place importante. C'est la broderie à fils sur linon et cotonnade fine qui domine, mais elle prend alors l'aspect de diverses broderies à jours, en rangs parallèles, couvrant parfois toute la surface de la robe. Très à la mode était un tissu transparent, en laine, portant le nom de "voile léger", qu'on brodait de fines paillettes métalliques. Le bas des robes, dans ce tissu, s'ornait souvent d'applications et de broderies en relief, associ�es aux matériaux les plus variés.

Les brodeuses russes, tout en suivant la mode européenne, créaient leurs propres compositions qui se faisaient remarquer par leur éclatant coloris typiquement national. Les dessins de ces broderies se rapportaient aux images de la nature familières aux Russes, tels ces pans de robes constellés de baies rouges de grappes mûres de sorbier ou les fleurs de chardon.

La mode évolue aux dépens de la broderie, celle-ci perd de plus en plus sa place en vedette dans l'ornementation des vêtements urbains, mais persiste dans la décoration d'intérieur. Les gens s'engouent des tapisseries, tableaux, paravents et autres pièces d'ameublement en diverses techniques nouvelles. Toutes sortes de broderies s'appliquent sur différents accessoires et menus objets usuels : réticules, porte-monnaies, calepins et autres. De cette époque proviennent des portefeuilles à ornements originaux, brodés en crins, dont le dessin évoque l'estampe. La broderie à minuscules perles de verre se développe. Le XIXème siècle favorisa particulièrement la broderie au point de croix sur canevas exécut�e en fils de couleur et le plumetis pour représenter les passages gradués des clairs-obscurs. La broderie au tambour, surfilée de fil blanc, sert dorénavant à orner les vêtements et la lingerie. En revanche, la broderie d'or devient le privilège de l'uniforme et des vêtements de la cour.

Dans la seconde moitié du XIXème siècle, la broderie s'applique aussi sur les vêtements de dessus : pèlerines, mantilles et capes. Les éléments principaux étaient exécutés en cordonnet, strass et applications. La décoration des objets usuels et de la lingerie était réalisée au nouveau point, dit "anglais", l'ornement étant créé par diverses combinaisons de ronds piqués dans le tissu, bordés tout autour, en relief, par des points compacts de boutonnière.

Le dernier quart du XIXème siècle a vu l'avènement de la broderie fabriquée à la machine, d'une qualité artistique moins grande que celle confectionnée à la main. Dans les villes, la broderie à la main était de plus en plus remplacée par des garnitures ornementales industrielles.

La broderie paysanne du XIXème siècle garde, par contre, son haut niveau artistique. Se développant sur une base traditionnelle, cette technique s'enrichit de nouvelles solutions en interprétant les éléments de l'art "savant" et de la mode urbaine. La palette des couleurs se diversifie par l'apport des colorants dérivés de l'aniline.

Au XIXème et au début du XXème siècle, l'art populaire du nord de la Russie s'enrichit de la broderie au tambour sur andrinople (étoffe de coton bon marché, le plus souvent rouge), qui donna lieu à des ouvrages à dessins ornementaux dynamiques, remaniant des motifs traditionnels et des sujets de genre. Les compositions libres et animées de la broderie au tambour sont empreintes de spontanéité et de joie, en rapport avec le milieu ambiant.

Les broderies géométriques représentent le plus ancien type d'ornement connu en Europe, déjà à l'époque paléolithique. Nombre de ces éléments symbolisaient le soleil, l'eau, le principe féminin ou exprimaient l'idée de la croissance. Tout comme les ornements en rainure triangulaire taillée dans le bois, ces sujets décoratifs dans la broderie représentent le patrimoine archa�que de l'art populaire russe.

Avec le développement intense de la fabrication industrielle de la fin du XIXème et du début du XXème siècle, l'influence de la ville pénètre dans le milieu paysan et donne lieu à un processus complexe alliant la conservation des traditions à la parte des caractéristiques de l'originalité régionale. La conséquence en a été, pour la broderie, une extension généralisée des dessins de fleurs "plus vrais que vraies", tirées des catalogues imprimés et des productions publicitaires de la ville. En même temps que les marchandises industrielles, arrive au village la broderie impersonnelle rouge-noir au point de croix, qui supplante les procédés et les ornements traditionnels.

Les broderies créées par de nombreuses générations d'ouvrières habiles, ayant exercé leur art dans divers centres de culture artistique russe, apportent un témoignage éloquent de leur époque. C'est pourquoi la broderie fait l'objet d'études d'un grand nombre de spécialistes. Du reste, tant l'artisan que l'artiste de métier d'aujourd'hui se tournent vers ces joyaux des générations passées. Et c'est sur les riches traditions de la broderie russe que se développent les métiers artistiques contemporains.

Source : "La broderie et la dentelle russes", L. Yefimova et R. Belogorska�a, Office du Livre, Editions Vilo, Paris, 1982 pour la version russe, 1986 pour la version française.